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COSYBU

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ABOLITION DU TRAVAIL FORCÉ OU OBLIGATOIRE

M. Kern et C. Sottas 4

 

4.1. INTRODUCTION

Dans le monde d’aujourd’hui, le travail forcé ou obligatoire est imposé à des fins de production ou de service, et en tant que sanction ou corollaire de punition; il est exigé par l’Etat ou par des personnes ou entités privées, sous couvert de lois et réglementations nationales ou illégalement, ouvertement à l’insu du public.

En principe, le travail forcé ou obligatoire est presque universellement proscrit: les deux conventions de l’OIT traitant de l’abolition du travail forcé ou obligatoire sont les plus largement ratifiées: la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, a été ratifiée par 156 Etats et la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, a reçu 153 ratifications.

Un résumé des instruments pertinents de l’OIT figure dans le tableau 4.1. 

En outre, dans la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail, adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 86e session, en 1998, la CIT:

Déclare que l’ensemble des Membres, même lorsqu’ils n’ont pas ratifié les conventions en question, ont l’obligation, du seul fait de leur appartenance à l’Organisation, de respecter, promouvoir et réaliser, de bonne foi et conformément à la Constitution, les principes concernant les droits fondamentaux qui sont l’objet desdites conventions, à savoir… l’élimination de toute forme de travail forcé ou obligatoire…

Les dispositions fondamentales des deux conventions seront exposées ci-dessous.

4.2. CONVENTION (No 29) SUR LE TRAVAIL FORCÉ, 1930

Les principales dispositions de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, seront examinées comme suit: 1) Mesures prévues par les articles 1, paragraphe 1, et 25 de la convention; 2) Définition du travail forcé ou obligatoire (art. 2, paragr. 1); 3) Exclusions du champ d’application de la convention (art. 2, paragr. 2); 4) Statut actuel de l’article 1, paragraphe 2, et des articles 4 à 24 de la convention.

4.2.1. Mesures prévues par les articles 1, paragraphe 1,et 25 de la convention

Les Etats qui ratifient la convention sur le travail forcé, 1930, prennent l’engagement fondamental de «supprimer l’emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes, dans le plus bref délai possible»1. Cette obligation de supprimer le recours au travail forcé ou obligatoire, tel que défini dans la convention2, implique pour l’Etat à la fois une obligation de s’abstenir

et une obligation d’agir. L’Etat doit s’abstenir d’imposer du travail forcé ou obligatoire et ne pas tolérer son imposition par d’autres, et il doit abroger toutes les lois et tous les textes réglementaires ou administratifs qui prévoient ou tolèrent le recours au travail forcé ou obligatoire, de sorte que tout recours à un tel travail, qu’il soit le fait de personnes privées ou de fonctionnaires

publics, s’avère illégal en droit national.

En outre, l’Etat doit assurer que «le fait d’exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales» et que «les sanctions imposées par la loi sont réellement efficaces et strictement appliquées»3 (voir encadré).

4.2.2. Définition du travail forcé ou obligatoire (art. 2, paragr. 1)

Aux termes de la convention, le «travail forcé ou obligatoire» désigne «tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré»4. Avant d’exposer les exceptions formelles retenues dans la convention5, il convient de s’attacher à trois aspects de cette définition afin de mesurer la portée

générale de la convention: la notion de «travail ou service», la «menace d’une peine quelconque», et le critère énoncé par les termes «ne s’est pas offert de plein gré»6.

a) Travail ou service

En premier lieu, la définition vise le «travail ou service». Or, comme l’a relevé la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations7, l’imposition d’un travail ou service se distingue des cas dans lesquels un enseignement ou une formation doivent être suivis. Le principe de l’enseignement obligatoire est reconnu dans diverses normes internationales en tant que moyen d’assurer le plein exercice du droit à l’éducation8 et il est également prévu dans plusieurs instruments de l’OIT9. Une distinction analogue est faite, dans d’autres normes internationales du travail, entre le travail et la formation professionnelle10. 

Pour supprimer effectivement le recours au travail forcé ou obligatoire et assurer que des sanctions pénales efficaces soient non seulement prévues par la loi, mais encore strictement appliquées, les mesures à prendre doivent tenir compte de la nature des problèmes qui peuvent se poser dans la pratique. Ainsi, s’agissant de la traite de personnes à des fins d’exploitation, la commission d’experts a cherché à connaître, entre autres, toutes mesures prises pour assurer que les dispositions pénales nationales réprimant l’imposition de travail forcé ou obligatoire, le trafic de personnes et ceux qui exploitent la prostitution d’autrui «soient strictement appliquées à l’égard des personnes responsables d’imposition de travail forcé à l’égard de migrants légaux ou illégaux, notamment dans des ateliers clandestins, dans la prostitution, pour des services domestiques, ou encore dans l’agriculture; plus particulièrement toutes mesures nécessaires dans la pratique pour que des procédures judiciaires soient engagées et menées à bonne fin, notamment:

a) toutes mesures tendant à inciter les victimes à s’adresser aux autorités, comme:

i) l’autorisation de rester dans le pays au moins pendant la durée des procédures judiciaires et, éventuellement, de manière permanente;

ii) une protection efficace des victimes acceptant de témoigner et de leur famille contre les représailles des exploiteurs, tant dans le pays d’accueil que dans le pays d’origine de la victime, avant, pendant et après toute procédure judiciaire, et au delà de l’expiration d’une peine d’emprisonnement qui serait éventuellement infligée aux exploiteurs; et la participation du gouvernement à toute forme de coopération intergouvernementale mise en place à cette fin;

iii) des mesures tendant à mettre les victimes et les victimes potentielles de trafic au courant des dispositions visées sous i) et ii), en tenant dûment compte de toutes barrières linguistiques et circonstances d’isolement physique des victimes; 

b) toutes dispositions prises pour renforcer l’investigation active du crime organisé en matière de trafic de personnes, d’exploitation de la prostitution d’autrui et d’exploitation d’ateliers clandestins, et notamment:

i) la dotation des organes de la force publique en ressources matérielles et humaines adéquates;

ii) la formation spécifique des fonctionnaires de la force publique, notamment dans les secteurs du contrôle de l’immigration, de l’inspection du travail et de la police des mœurs, dans une optique consistant à aborder les problèmes de trafic de personnes selon des modalités propices à l’arrestation des exploiteurs plutôt que des victimes;

iii) la coopération internationale entre organes de la force publique en vue de prévenir et combattre la traite des personnes;

c) la coopération avec les organisations d’employeurs et de travailleurs ainsi que les organisations non gouvernementales engagées dans la protection des droits de l’homme et dans le combat contre la traite des personnes, pour les questions visées

sous … a) et b) ii)*.»

* BIT: Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, rapport III (partie

1A), CIT, 89e session, 2001, observation générale, convention nº 29, pp. 130-131.

La Commission a également admis qu’un programme de formation professionnelle obligatoire, par analogie avec l’instruction générale obligatoire, et considéré comme un prolongement de celle-ci, ne constitue pas un travail ou un service obligatoire

au sens de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 193011. «Toutefois, étant donné que la formation professionnelle comprend généralement une certaine quantité de travaux pratiques, la distinction entre formation et emploi n’est pas toujours facile à établir. C’est en considérant les différents éléments qui concourent à l’orientation globale d’un programme donné qu’on peut déterminer s’il relève incontestablement de la formation professionnelle ou s’il comporte, au contraire, l’imposition de travaux ou de services

correspondant à la définition du ‘travail forcé ou obligatoire’12.»

b) Menace d’une peine quelconque

Pour entrer dans la définition du «travail forcé ou obligatoire» donnée dans la convention de 1930, le travail ou le service doit avoir été exigé «sous la menace d’une peine quelconque». Il a été précisé, lors de l’examen du projet d’instrument par la Conférence, que la peine dont il est question ici ne doit pas revêtir forcément la forme d’une sanction pénale, mais qu’il peut s’agir également de la privation de quelque droit ou avantage13. Par exemple, il peut s’agir, pour un prisonnier, du classement à un niveau d’avantages inférieur14, ou d’une perspective réduite de libération anticipée15.

c) Offre de plein gré

En examinant la question de «l’offre de plein gré», les organes de contrôle de l’OIT ont touché un certain nombre d’aspects différents: la forme et l’objet du consentement, les incidences d’une contrainte extérieure ou indirecte, imputable ou non à l’Etat ou à l’employeur, la possibilité pour un mineur (ou ses parents) de donner un consentement valable, et la possibilité de reprendre un consentement qui avait été librement donné.

i) Forme et objet du consentement

La convention ne prescrit pas les modalités du consentement au travail, et les organes de contrôle de l’OIT ne se sont attachés au consentement formel (quelles qu’en soient les modalités) que dans les circonstances particulières où le libre arbitre du travailleur ne peut être présumé, et notamment lorsqu’un prisonnier fait un travail qui ne saurait lui être imposé aux termes

de la convention16.

Pour ce qui est de l’objet du consentement, il y a lieu de distinguer entre la recherche d’un emploi et l’acceptation d’une situation concrète: ainsi, lorsque des travailleurs migrants à la recherche d’un emploi ont été amenés par la ruse, des fausses promesses, et la rétention des papiers d’identité ou la force à rester à la disposition d’un employeur, les organes de contrôle de

l’OIT ont constaté la violation de la convention17.

ii) Rôle des contraintes extérieures ou indirectes

En examinant la liberté de «s’offrir de plein gré» pour un travail ou service, il est nécessaire de tenir compte du cadre législatif et pratique qui assure ou limite cette liberté: ainsi, la simple liberté de choisir parmi toutes les catégories de travail ou de service existantes ne suffit pas pour assurer le respect de la convention lorsque la loi nationale prévoit une obligation générale de travailler, c’est-à-dire établit une obligation juridique d’avoir une activité lucrative pour tous les citoyens valides qui ne suivent pas un enseignement. Cela a été jugé incompatible avec les conventions de 1930 et 195718. 

De même, lorsqu’une main-d’œuvre captive – telle que les personnes appelées au service militaire obligatoire, ou purgeant une peine privative de liberté – se voit offrir un choix limité entre le travail qui peut de toute manière lui être imposé aux termes des exceptions prévues par la convention et un autre travail qui lui est proposé et qui ne rentre pas dans ces exceptions19, cette liberté de choix toute relative ne suffit pas en soi pour considérer l’acceptation du travail proposé comme librement consentie20. 

Une contrainte extérieure ou indirecte portant atteinte à la liberté du travailleur de «s’offrir de plein gré» peut résulter non seulement d’un acte des autorités, tel qu’une loi, mais également de la pratique d’un employeur, telle que la rétention des papiers d’identité d’un travailleur migrant21; dans ce dernier cas, la responsabilité de l’Etat est également engagée aux termes

de la convention22. Toutefois, toutes les contraintes extérieures ou indirectes existant de fait ne sont pas imputables à l’Etat ou à l’employeur: le besoin de travailler pour gagner sa vie ne l’est pas en soi, en l’absence d’autres éléments pertinents qui sont de leur ressort. Un tel élément serait par exemple une législation aux termes de laquelle les personnes en quête d’asile ne peuvent

normalement pas occuper d’emploi, mais ces mêmes personnes peuvent être appelées à accomplir un «travail socialement utile» qu’elles n’ont d’autre choix que d’accepter sous peine de perdre leur droit à l’assistance sociale23.

Afin de déterminer dans quelle mesure une contrainte purement économique est imputable à l’Etat, les organes de contrôle de l’OIT ont utilisé les critères suivants:

Dans un cas où il existe une situation objective de contrainte économique qui n’a, toutefois, pas été créée par le gouvernement, ce n’est qu’en exploitant cette situation en offrant un taux de rémunération excessivement bas que le gouvernement pourrait se voir, dans une certaine mesure, imputer une situation qu’il n’a pas créée. En outre, il pourrait être tenu responsable d’avoir lui-même organisé ou fomenté la contrainte économique dès lors que le grand nombre de personnes embauchées par le gouvernement à des taux de rémunération excessivement bas et le volume de travail effectué par ces personnes auraient, par un effet de substitution progressive, une incidence sur la situation d’autres personnes, de sorte qu’elles perdent leur emploi normal et tombent à leur tour sous la contrainte économique24.

iii) Possibilité pour un mineur (ou ses parents) de donner un consentement valable

Comme les organes de contrôle de l’OIT l’ont relevé, en ce qui concerne le travail des enfants, la question se pose de savoir si un mineur peut être considéré comme s’étant offert «de son plein gré» pour un travail ou un service et, dans l’affirmative, dans quelles conditions; si le consentement des parents est nécessaire à cet égard et s’il est suffisant, et quelles sont les sanctions en cas de refus25. La plupart des dispositions juridiques nationales, qui prévoient la majorité civile à un âge généralement compris entre 18 et 21 ans, fixent pour la conclusion d’un contrat de travail une limite d’âge inférieure, pouvant correspondre à la fin de la scolarité obligatoire; mais les emplois dangereux pour la santé, la sécurité ou la moralité sont généralement interdits aux personnes de moins de 18 ans, conformément aux conventions pertinentes de l’OIT26, de sorte que ni elles-mêmes, ni les personnes ayant l’autorité parentale ne peuvent valablement consentir à leur admission à un tel emploi27. Les organes de contrôle de l’OIT ont régulièrement soulevé des cas d’exploitation du travail des enfants au titre de la convention

(nº 29) sur le travail forcé, 193028, mais également demandé – et obtenu – que des mineurs engagés dans une carrière militaire puissent revenir sur leur engagement29.

iv) Possibilité de reprendre un consentement qui avait été librement donné

Dès lors qu’une personne adulte s’est «offerte de plein gré» pour un travail ou service, ce dernier ne relève pas de la stricte définition du travail forcé ou obligatoire donnée à l’article 2, paragraphe 1, de la convention; est-ce que cela signifie que, une fois le consentement librement donné, toutes restrictions à la liberté des travailleurs de quitter leur emploi échappent à la convention? Les organes de contrôle de l’OIT ont estimé que, bien que, dans ces cas, l’emploi soit à l’origine le résultat d’un accord conclu librement, le travailleur ne saurait aliéner son droit au libre choix de son travail. En conséquence, les dispositions légales empêchant un travailleur engagé pour une durée indéterminée (ou pour une très longue durée) de mettre fin à son emploi moyennant un préavis raisonnable ont pour effet de transformer une relation contractuelle fondée sur la volonté des parties en un service imposé par la loi et sont incompatibles avec les conventions concernant le travail forcé. Il en est de même lorsque le travailleur est tenu de servir au-delà de l’échéance d’un contrat de durée déterminée30. Les organes de contrôle de l’OIT ont ainsi soulevé le cas des restrictions à la liberté de quitter l’emploi moyennant un préavis raisonnable qui ont été imposées dans différents pays notamment aux militaires de carrière31, à toutes les personnes au service du gouvernement32 et des secteurs socialistes ou mixtes33, voire à l’ensemble des travailleurs34.

4.2.3. Exclusions du champ d’application de la convention(art. 2, paragr. 2)

Aux termes de l’article 2, paragraphe 2, de la convention, certaines formes de service obligatoire qui auraient été autrement couvertes par la définition générale du «travail forcé ou obligatoire» s’en trouvent exclues «aux fins de la présente convention»:

a) tout travail ou service exigé en vertu des lois sur le service militaire obligatoire et affecté à des travaux d’un caractère purement militaire;

b) tout travail ou service faisant partie des obligations civiques normales des citoyens d’un pays se gouvernant pleinement lui-même;

c) tout travail ou service exigé d’un individu comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire, à la condition que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées; 

d) tout travail ou service exigé dans les cas de force majeure, c’est-à-dire dans les cas de guerre, de sinistres ou menaces de sinistres tels qu’incendies, inondations, famines, tremblements de terre, épidémies et épizooties violentes, invasions d’animaux, d’insectes ou de parasites végétaux nuisibles, et en général toutes circonstances mettant en danger ou risquant de mettre en danger la vie ou les conditions normales d’existence de l’ensemble ou d’une partie de la population;

e) les menus travaux de village, c’est-à-dire les travaux exécutés dans l’intérêt direct de la collectivité par les membres de celle-ci, travaux qui, de ce chef, peuvent être considérés comme des obligations civiques normales incombant aux membres de la collectivité, à condition que la population elle-même ou ses représentants directs aient le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux. 

Les conditions fixées par ces dispositions qui définissent la portée des  exceptions seront examinées ci-après.

  1. Service militaire obligatoire 

La convention nº 29 exempte de son champ d’application le service militaire obligatoire, pour autant qu’il soit «affecté à des travaux d’un caractère purement militaire»35. Cette condition du «caractère purement militaire», adoptée spécifiquement pour écarter la mobilisation de conscrits pour les travaux publics36, trouve son corollaire dans l’article 1 

b) de la convention

(nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, qui interdit le recours au travail forcé ou obligatoire «en tant que méthode de mobilisation et d’utilisation de la main-d’oeuvre à des fins de développement économique»37.

Il existe toutefois des circonstances particulières dans lesquelles une activité non militaire accomplie dans le cadre du service militaire obligatoire ou en lieu et place de celui-ci échappe au champ d’application de la convention sur le travail forcé38. En premier lieu, les conscrits, comme tous les autres citoyens, peuvent être appelés à effectuer un travail nécessaire pour faire face aux cas de force majeure tels que définis par la convention39. D’autre part, les conscrits accomplissant leur service dans des unités telles que le génie peuvent, par exemple, être appelés à participer à la construction de ponts et de chaussées, dans le cadre de leur entraînement militaire.

Enfin, la convention ne mentionne pas la question des objecteurs de conscience, mais les organes de contrôle de l’OIT ont estimé que leur exemption du service militaire obligatoire, assortie d’une obligation d’accomplir un service de remplacement, constitue un privilège accordé individuellement, au nom de la liberté de conscience, à la demande de l’intéressé. Mais, de

manière plus générale, l’existence d’une possibilité de choix entre le service militaire proprement dit et un travail non militaire ne suffit pas en soi pour écarter l’application de la convention lorsque le choix entre différentes formes de service s’opère dans le cadre et sur la base d’une obligation de service. Il convient donc de tenir compte, entre autres, du nombre de personnes concernées ainsi que des conditions dans lesquelles elles effectuent leur choix pour déterminer s’il s’agit d’un privilège accordé à des individus sur leur demande ou si, au contraire, le service national devient un moyen de poursuivre le développement économique et social sur la base d’un travail obligatoire40.

b) Obligations civiques normales

«Tout travail ou service faisant partie des obligations civiques normales des citoyens d’un pays se gouvernant pleinement lui-même» est exclu du champ d’application de la convention41. 

Des exemples sont la participation obligatoire à un jury et le devoir d’assister une personne en danger42. D’autres «obligations civiques normales » sont expressément mentionnées et circonscrites dans la convention: le service militaire obligatoire, dans les conditions exposées plus haut43, ainsi que l’assistance dans les cas de force majeure44 et les «menus travaux du village»45. Les organes de contrôle de l’OIT ont relevé que la référence générale aux «obligations civiques normales» doit être interprétée à la lumière des autres dispositions de la convention et ne saurait être invoquée pour justifier le recours à des formes de service obligatoire qui sont contraires aux conditions spécifiques énoncées dans ces autres dispositions46.

c) Travail pénitentiaire

La convention exclut de son champ d’application «tout travail ou service exigé d’un individu comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire, à la condition que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées»47. Le travail pénitentiaire obligatoire n’est donc exclu du champ d’application de la convention que sous réserve d’un certain nombre de conditions relatives, d’une part, aux fondements de l’obligation au travail et, d’autre part, aux conditions d’utilisation de la main-d’œuvre pénale.

i) Fondements de l’obligation de travail

Conséquence d’une condamnation

La convention exige que les prisonniers ne puissent être astreints au travail qu’en conséquence d’une condamnation. C’est dire que les personnes qui sont détenues, mais qui n’ont pas été condamnées – telles que les prévenus, qui attendent de passer en jugement, ou les personnes détenues sans jugement –, ne devraient pas être obligées de travailler. Il résulte également de l’utilisation du terme «condamnation» que l’intéressé doit avoir été reconnu coupable d’un délit. En l’absence d’une décision reconnaissant cette culpabilité, il ne devrait pas être imposé de travail obligatoire, même en vertu d’une décision judiciaire48.

Condamnation par décision judiciaire

Aux termes de la convention, le travail ne doit être exigé qu’à la suite d’une condamnation prononcée «par une décision judiciaire». Le travail obligatoire imposé par des autorités administratives ou par d’autres organismes non judiciaires n’est donc pas compatible avec la convention. Cette disposition vise à ne permettre l’imposition du travail pénitentiaire que sous réserve de l’observation des garanties prescrites par les principes généraux du droit reconnus par la communauté des nations, tels que la présomption d’innocence, l’égalité devant la loi, la régularité et l’impartialité de la procédure, l’indépendance et l’impartialité des tribunaux, les garanties nécessaires à la défense, la définition précise du délit et la non-rétroactivité de la loi pénale49.

ii) Conditions d’utilisation du travailpénitentiaire obligatoire

Aux termes de la convention, le travail pénitentiaire obligatoire doit être «exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques», et le prisonnier ne doit pas être «concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées»50. Les deux conditions s’appliquent de manière cumulative et indépendante; le fait que le prisonnier demeure constamment sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques ne dispense pas en soi le gouvernement de respecter la seconde condition, à savoir que la personne ne soit pas concédée ou mise à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées51.

Surveillance et contrôle des autorités publiques

Si le contrôle et la surveillance se limitent à une inspection périodique des établissements, cela ne saurait suffire à satisfaire l’exigence de surveillance et de contrôle contenue dans la convention52.

Signification des termes «concédé ou mis à la disposition de»

Concession. La description des systèmes de l’affermage, de l’entreprise générale et de l’entreprise spéciale, contenue dans le Mémoire du Bureau international du Travail de 1931 «sur les problèmes de l’administration pénale relevant de sa compétence, c’est-à-dire ceux qui concernent le travail pénitentiaire »53, donne le sens ordinaire du terme «concédé à», tel qu’on l’entendait à l’époque de l’adoption de la convention:

a) L’affermage (Lease System). L’affermage a pour base un contrat entre l’Etat et un entrepreneur, en vertu duquel les prisonniers sont loués à ce dernier. L’affermataire (lessee) se charge du logement, de la nourriture, de l’habillement et de la surveillance du détenu. Il doit, en outre, payer une somme forfaitaire pour chaque prisonnier. Il acquiert en revanche le droit d’utiliser le travail du prisonnier pendant la durée du contrat. Dans ses applications modernes, le système de l’affermage est

soumis à un contrôle constant par des employés de l’Etat. 

b) L’entreprise générale. Dans ce système, tous les prisonniers sont confiés à un seul entrepreneur, mais, contrairement à ce qui se passe dans l’affermage, c’est l’Etat qui fournit les bâtiments et installations pour leur logement et qui organise leur surveillance. Il nomme et rémunère à cet effet des employés spéciaux. L’entrepreneur doit se charger de la nourriture des prisonniers, fournir la matière première et les instruments de travail et verser à l’Etat une indemnité forfaitaire. Comme contreprestation, l’Etat met le travail du prisonnier à la disposition de l’entrepreneur. 

c) L’entreprise spéciale. Ici, comme dans l’entreprise générale, l’Etat fournit les bâtiments et les installations nécessaires au logement des prisonniers, mais il garde entièrement la charge de l’administration des établissements pénitentiaires. Des prisonniers, individuellement ou par groupes, sont attribués à l’entrepreneur. Le choix de ces prisonniers est effectué dans chaque cas par l’administration de la prison. De son côté, l’entrepreneur fournit la matière première et les instruments de travail

et assume la direction des travaux par l’intermédiaire de ses employés, qui sont admis à pénétrer dans la prison à cet effet. Il doit aussi payer pour le travail des prisonniers un salaire journalier ou un salaire aux pièces. Le produit du travail lui appartient54.

Mise à la disposition. Des arrangements en vertu desquels l’entreprise privée ne paie pas les autorités publiques en tant que fournisseurs des prestations des prisonniers, mais reçoit au contraire des subsides de l’Etat pour la gestion d’une prison privée, diffèrent de ce qui serait normalement considéré comme des accords de concession (ou d’affermage). Cependant, la situation

d’une personne placée par l’Etat avec l’obligation de travailler dans une prison gérée par un entrepreneur privé n’est pas affectée par la question de savoir si cet entrepreneur rémunère l’Etat ou si c’est l’Etat qui subsidie l’entrepreneur. Aux fins de la convention, dans le premier cas le prisonnier est «concédé à» l’entrepreneur privé, dans le second il ou elle est «mis(e) à la

disposition de» celui-ci55.

Rôle du profit ou bénéfice privé. La question du sens du flux de paiements entre l’Etat et les entrepreneurs privés mène à celle du profit ou bénéfice. Rien ne suggère que l’absence d’un bénéfice comptable soustrairait un opérateur privé à l’application des dispositions de la convention interdisant que la personne soit «concédé[e] ou mis[e] à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées»56.

iii) Conditions pour un emploi privé de prisonniers

Le travail pénitentiaire obligatoire n’est exempté du champ d’application de la convention qu’à la condition que la main-d’oeuvre ne soit pas concédée ou mise à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées57. Dans certains pays, toutefois, on accorde à certains prisonniers la possibilité d’accepter volontairement, surtout pendant la période

qui précède leur libération, un emploi au service d’un employeur privé, sous réserve de certaines garanties quant au paiement d’un salaire normal et à la couverture de sécurité sociale, au consentement des syndicats, etc.58. La question se pose donc de savoir si, étant détenus, les prisonniers peuvent se trouver dans une situation de travail réellement volontaire, pour laquelle

ils se sont offerts de plein gré et sans la menace d’une peine quelconque, y compris la perte d’un droit ou avantage59, de sorte que le travail ne relève pas de la définition du travail forcé ou obligatoire donnée à l’article 2, paragraphe 1, de la convention. Si tel est le cas, les conditions fixées à l’article 2, paragraphe 2 c), pour le travail pénitentiaire obligatoire deviennent inapplicables,

et l’emploi privé de prisonniers possible. En premier lieu, l’emploi privé de la main-d’oeuvre pénitentiaire doit dépendre du consentement formel de chaque prisonnier60. Mais l’exigence d’un tel consentement formel n’est pas en elle-même suffisante pour écarter la possibilité que le consentement soit donné sous la menace de la perte d’un droit ou avantage, voire de l’affectation à un travail obligatoire qui peut être imposé légalement61. La main-d’oeuvre pénale est une maind’oeuvre

captive au sens propre du terme, c’est-à-dire qu’elle n’a, en droit et en pratique, pas d’autre accès à un emploi que dans les conditions fixées unilatéralement par l’administration pénitentiaire. En conséquence, il semble difficile, voire impossible, notamment dans un contexte carcéral, de reconstituer les conditions d’une relation de travail libre en l’absence d’un contrat

de travail et en dehors du champ d’application du droit du travail62.

Les conditions proches d’une relation de travail libre constituent l’indicateur le plus fiable du caractère volontaire du travail. Ces conditions ne doivent pas nécessairement reproduire toutes celles qui s’appliquent sur un marché libre mais, en matière de salaires, de sécurité sociale, de sécurité et de santé au travail et d’inspection du travail, les conditions dans lesquelles

est fourni le travail pénitentiaire ne devraient pas être hors de proportion avec celles qui prévalent sur le marché libre du travail, au point qu’elles puissent être considérées comme relevant de l’exploitation. Ces faits, ainsi que les circonstances dans lesquelles le consentement formel a été donné, devront être évalués en vue de déterminer si la convention est respectée

lorsque des opérateurs privés interviennent dans le cadre du travail pénitentiaire63.

d) Cas de force majeure

La convention exclut de son champ d’application «tout travail ou service exigé dans les cas de force majeure, c’est-à-dire dans les cas de guerre, de sinistres ou menaces de sinistres tels qu’incendies, inondations, famines, tremblements de terre, épidémies et épizooties violentes, invasions d’animaux, d’insectes ou de parasites végétaux nuisibles, et en général toutes circonstances

mettant en danger ou risquant de mettre en danger la vie ou les conditions normales d’existence de l’ensemble ou d’une partie de la population»64. 

Comme l’indiquent les exemples énumérés dans la convention, la notion de force majeure implique un événement soudain et imprévu qui appelle une intervention immédiate. Pour respecter les limites de l’exception prévues dans la convention, le pouvoir de mobiliser de la main-d’oeuvre devrait être limité aux véritables cas de force majeure. En outre, l’importance du service imposé ainsi que les fins auxquelles il est utilisé devraient être limitées strictement en fonction des exigences de la situation. De même que l’article 2, paragraphe 2 a), de la convention n’exclut de son champ d’application le «travail ou service exigé en vertu des lois sur le service militaire obligatoire» que pour «des travaux d’un caractère purement militaire»65, l’article 2, paragraphe 2 d), concernant les cas de force majeure, ne constitue pas une permission générale d’imposer – à l’occasion d’une guerre, d’un incendie ou d’un tremblement de terre – toute sorte de service obligatoire, mais ne peut être invoqué que pour un service strictement indispensable afin de faire face à un danger imminent pour la population66.

e) Menus travaux de village

Sont également exclus du champ d’application de la convention «les menus travaux de village, c’est-à-dire les travaux exécutés dans l’intérêt direct de la collectivité par les membres de celle-ci, travaux qui, de ce chef, peuvent être considérés comme des obligations civiques normales incombant aux membres de la collectivité, à condition que la population elle-même ou

ses représentants directs aient le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux»67. Les organes de contrôle de l’OIT68 ont appelé l’attention sur les critères qui déterminent les limites de cette exception et servent à la distinguer d’autres formes de services obligatoires qui, aux termes de la convention, devraient être abolies (comme le travail forcé pour des travaux publics d’intérêt général ou local). Ces critères sont les suivants:

● il doit s’agir de «menus travaux», c’est-à-dire essentiellement des travaux d’entretien et, exceptionnellement, des travaux relatifs à la construction de certains bâtiments destinés à améliorer les conditions sociales de la population du village elle-même (petites écoles, salles de consultations et de soins médicaux, etc.)69;

● il doit s’agir de «travaux de village» effectués «dans l’intérêt direct de la collectivité» et non pas de travaux destinés à une communauté plus large;

● la population «elle-même», c’est-à-dire celle qui doit effectuer les travaux, ou ses représentants «directs» (c’est-à-dire, par exemple, le conseil du village) doivent avoir «le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux».

4.2.4. Statut actuel de l’article 1, paragraphe 2, et des articles 4 et suivants de la convention

Les Etats qui ratifient la convention sont obligés «de supprimer l’emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes70 dans le plus bref délai possible»71; toutefois, la convention, telle qu’adoptée en 1930, prévoit que «En vue de cette suppression totale, le travail forcé obligatoire pourra être employé, pendant la période transitoire, uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans les conditions et avec les garanties stipulées par les articles qui suivent72.»

Cependant, puisque la convention, adoptée en 1930, demande la suppression du travail forcé dans le plus bref délai     possible, dire aujourd’hui qu’une certaine forme de travail forcé ou obligatoire est conforme à l’une des exigences de cet ensemble de dispositions revient à méconnaître la fonction transitoire de ces dispositions et n’est conforme ni à l’esprit de la convention ni au statut de l’abolition du travail forcé et obligatoire en droit international général, en tant que norme impérative à laquelle aucune dérogation n’est admise73. En conséquence, les organes de contrôle de l’OIT ont estimé que le recours à une forme de travail forcé ou obligatoire relevant, aux termes de l’article 2, du champ d’application de la convention ne saurait être justifié en invoquant le respect des articles 1, paragraphe 2, et 4 à 24, bien que les interdictions absolues figurant dans ces dispositions lient toujours les Etats ayant ratifié la convention74.

4.3. CONVENTION (No 105) SUR L’ABOLITION DU TRAVAIL FORCÉ, 1957

4.3.1. Dispositions de fond

Aux termes de l’article 2 de la convention, Tout Membre de l’Organisation internationale du Travail qui ratifie la présente convention s’engage à prendre des mesures efficaces en vue de l’abolition immédiate et complète du travail forcé ou obligatoire tel qu’il est décrit à l’article 1 de la présente convention.

Selon l’article 1,

Tout Membre de l’Organisation internationale du Travail qui ratifie la présente convention s’engage à supprimer le travail forcé ou obligatoire et à n’y recourir sous aucune forme:

a) en tant que mesure de coercition ou d’éducation politique ou en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi;

b) en tant que méthode de mobilisation et d’utilisation de la main-d’oeuvre à des fins de développement économique;

c) en tant que mesure de discipline du travail;

d) en tant que punition pour avoir participé à des grèves;

e) en tant que mesure de discrimination raciale, sociale, nationale ou religieuse.

Avant d’aborder les circonstances particulières auxquelles se réfèrent les cinq cas énumérés sous l’article 1 a) à 1 e) de la convention75, il convient d’examiner sur un plan général la portée de la convention nº 105 par rapport à la convention nº 29 et, dans ce contexte, la définition du travail forcé ou obligatoire et l’incidence des exceptions à la convention nº 29, notamment

pour ce qui est du travail pénitentiaire obligatoire.

4.3.2. Portée de la convention no 105 par rapport à la convention no 29 et au travail pénitentiaire obligatoire

La convention nº 105 ne constitue pas une révision de la convention nº 29 mais était destinée à compléter l’instrument antérieur76. En l’absence d’une définition du «travail forcé ou obligatoire» dans la convention nº 105, la définition contenue dans la convention antérieure a été considérée valable d’une manière générale77, à savoir «tout travail ou service exigé d’un individu

sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré»78.

Toutefois, si la convention nº 29 prévoit l’abolition générale du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes – sous réserve des exceptions figurant à son article 2, paragraphe 279 –, la convention nº 105 ne requiert l’abolition du travail forcé ou obligatoire – sous quelque forme que ce soit – que dans les cinq cas énumérés à l’article 1 de cette convention80. De portée ainsi limitée par rapport à la portée générale de l’instrument antérieur, la convention nº 105 ne couvre donc du terrain nouveau que du fait que les exceptions figurant à l’article 2, paragraphe 2, de la convention nº 29 «aux fins de la présente convention», et notamment l’exclusion du travail pénitentiaire81, ne s’appliquent pas automatiquement à la convention ultérieure destinée à compléter la convention de 193082.

La convention nº 105 ne s’oppose pas à ce que du travail forcé ou obligatoire soit exigé d’un délinquant de droit commun reconnu coupable, par exemple, de vol, d’enlèvement, d’attentat à la bombe ou d’autres actes de violence ou encore d’une action ou omission mettant en danger la vie ou la santé d’autrui; en effet, bien qu’il soit astreint au travail sous la menace d’une peine et contre son gré, ce travail ne lui est pas imposé pour un des motifs énumérés dans la convention. Ainsi, le travail imposé à des personnes comme conséquence d’une condamnation judiciaire n’aura, dans la plupart des cas, aucun rapport avec l’application de la convention sur l’abolition du travail forcé. Par contre, si une personne est, de quelque manière que ce soit, astreinte au travail parce qu’elle a ou exprime certaines opinons politiques ou parce qu’elle a manqué à la discipline du travail ou participé à une grève83, cela relève de la convention qui n’admet le travail forcé ou obligatoire «sous aucune forme» en tant que sanction, mesure de coercition, d’éducation ou de discipline ou punition à l’égard des personnes visées à l’article 1 a), c) et d)84.

A ce propos, les organes de contrôle ont noté que, si dans le cas des délinquants de droit commun le travail pénitentiaire est destiné à la rééducation et à la réinsertion sociale, ce même besoin n’existe pas quand il s’agit de personnes condamnées pour leurs opinions ou pour avoir pris part à une grève. En outre, dans le cas des personnes condamnées pour avoir exprimé certaines opinions politiques, une intention de les réformer ou de les éduquer par le travail serait explicitement couverte par les termes de la convention, qui s’applique notamment à toute forme de travail obligatoire en tant que mesure d’éducation politique85.

Pour ces diverses raisons, les organes de contrôle de l’OIT ont estimé que le travail obligatoire sous toutes ses formes, y compris le travail pénitentiaire obligatoire, relève de la convention nº 105 quand il est infligé dans l’un des cas spécifiés par cette convention.

La conformité des législations pénales à la convention peut dès lors être assurée à différents niveaux: au niveau des droits et libertés civiques et sociaux, lorsque notamment l’activité et l’expression d’opinions politiques, la manifestation d’opposition idéologique, les infractions à la discipline du travail et la participation à des grèves échappent à la répression pénale; au niveau des peines pouvant être imposées, lorsqu’il s’agit uniquement d’amendes ou d’autres sanctions ne comportant pas d’obligation au travail; et, en dernier lieu, au niveau du régime pénitentiaire: dans un certain nombre de pays, la loi reconnaît traditionnellement aux prisonniers condamnés pour certains délits politiques un statut spécial, comparable à celui des prévenus, qui les libère du travail pénitentiaire imposé aux criminels de droit commun, tout en leur accordant la possibilité d’avoir une activité à leur demande.

 

4.3.3. Circonstances visées par la convention

a) Coercition politique (art. 1 a) de la convention)

La convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire en tant que mesure de coercition ou d’éducation politique ou en tant que sanction à l’encontre de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. La gamme des activités qui doivent être à l’abri d’une sanction comportant du travail forcé ou obligatoire comprend ainsi la liberté d’exprimer des opinions politiques ou idéologiques oralement, par la presse ou d’autres moyens de communication, de même que l’exercice de divers autres droits généralement reconnus, tels que les droits d’association et de réunion, par lesquels les citoyens cherchent à faire connaître et accepter leurs vues et adopter des politiques et lois qui les reflètent, exercice qui est susceptible d’être affecté par des mesures de coercition politique. Les peines comportant du travail obligatoire relèvent de la convention lorsqu’elles sanctionnent l’interdiction d’exprimer des opinions ou de manifester une opposition au système politique, social ou économique établi, que cette interdiction soit imposée directement par la loi ou au moyen d’une décision discrétionnaire de l’administration86.

Toutefois, certaines limitations aux droits et libertés en cause peuvent être établies par la loi «en vue d’assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d’autrui et afin de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l’ordre public et du bien-être général dans une société démocratique»87. Ainsi, la convention n’interdit ni la punition par des peines comportant du travail obligatoire des personnes qui recourent à la violence, incitent à la violence ou s’engagent dans des actes préparatoires à la violence, ni l’imposition judiciaire de certaines incapacités aux personnes convaincues d’infractions de cette nature88.

Outre les limites applicables dans des circonstances normales, la liberté d’expression et d’autres droits fondamentaux qui concernent la convention peuvent être soumis, pendant des périodes exceptionnelles, à des restrictions temporaires. La nécessité d’un recours inhabituel à de telles mesures est reconnue dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques «dans le cas où un danger public exceptionnel menace l’existence de la nation et est proclamé par un acte officiel»; il peut alors être dérogé aux normes du pacte, mais «dans la stricte mesure où la situation l’exige»89. Les organes de contrôle de l’OIT ont adopté un point de vue analogue en ce qui concerne les mesures d’exception telles que la suspension des libertés et droits fondamentaux qui  peuvent avoir une incidence sur l’application de l’article 1 a) de la convention dès lors qu’elles sont assorties de sanctions comportant du travail obligatoire. Des mesures exceptionnelles de ce genre ne sont admises que dans la mesure où elles sont nécessaires pour faire face à des circonstances mettant en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne90.

b) Développement économique (art. 1 b) de la convention)

L’article 1 b) de la convention interdit le travail forcé ou obligatoire «en tant que méthode de mobilisation et d’utilisation de la main-d’oeuvre à des fins de développement économique». Il découle des termes «mobilisation » et «développement économique» employés ici que l’article 1 b) vise des situations où le recours au travail forcé ou obligatoire a une certaine importance quantitative et une finalité économique91. L’interdiction s’applique même lorsque le recours au travail forcé en tant que méthode de mobilisation et d’utilisation de la main-d’oeuvre à des fins de développement économique a un caractère temporaire ou exceptionnel92. 

c) Discipline du travail (art. 1 c) de la convention)

Le travail forcé ou obligatoire imposé en tant que mesure de discipline du travail peut revêtir deux formes. Il peut consister en mesures destinées à assurer l’exécution, par un travailleur, de son travail sous la contrainte de la loi (sous la forme d’une contrainte physique ou d’une menace de punition) ou en une sanction pour manquement à la discipline du travail, avec des peines comportant une obligation de travail. Dans ce dernier cas, toutefois, les organes de contrôle de l’OIT ont distingué entre

les peines infligées pour faire respecter la discipline du travail en tant que telle (et qui tombent donc sous le coup de la convention) et celles qui frappent des manquements à la discipline du travail qui compromettent ou risquent de mettre en danger le fonctionnement de services essentiels93, ou qui sont commis soit dans l’exercice de fonctions essentielles pour la sécurité, soit dans des circonstances où la vie ou la santé sont en danger – actes ou omissions qui ne bénéficient pas de la protection de la convention. Dans de tels cas, cependant, il faut qu’il y ait vraiment danger et non pas simple dérangement. En outre, les travailleurs intéressés doivent rester libres de mettre fin à leur contrat moyennant un préavis raisonnable94. Les organes de contrôle ont identifié des mesures de discipline du travail relevant de la convention, notamment dans certaines lois régissant le secteur public ou la marine marchande95.

d) Participation à des grèves (art. 1 d) de la convention)

La convention interdit le recours aux sanctions comportant du travail forcé ou obligatoire «en tant que punition pour avoir participé à des grèves». Toutefois, les organes de contrôle de l’OIT ont relevé96 que la Commission

de la Conférence qui a examiné le projet de convention avait reconnu que  «dans certaines circonstances, des sanctions puissent être infligées pour participation à des grèves illégales et que ces sanctions comportent un travail pénitentiaire normal»97, et que de telles sanctions pouvaient être imposées, notamment en raison de l’existence «dans beaucoup de législations nationales de dispositions interdisant les grèves dans certains secteurs ou pendant les procédures de conciliation», ou «de l’accord volontaire des syndicats de certains autres pays pour renoncer au droit de grève dans certaines circonstances»98. En examinant la compatibilité des législations nationales sur les grèves avec la convention – dès lors qu’elles sont assorties de sanctions pouvant comporter du travail obligatoire –, les organes de contrôle de l’OIT ont suivi les principes développés en matière de liberté syndicale99 pour déterminer les restrictions particulières au droit de grève, et notamment les restrictions concernant les services essentiels et les représentants de la puissance publique, et celles concernant les situations d’exception, les grèves politiques et les conditions dans lesquelles la grève peut être déclenchée, afin de préciser les limites de la protection accordée par l’article 1 d) de la convention100.

e) Discrimination (art. 1 e) de la convention)

L’article 1 e) de la convention n’admet le recours à aucune forme de travail obligatoire «en tant que mesure de discrimination raciale, sociale, nationale ou religieuse». Cette disposition exige l’abolition de toute distinction discriminatoire fondée sur des critères raciaux, sociaux, nationaux ou religieux dans l’imposition d’un travail à des fins de production ou service, même lorsqu’il ne relève pas autrement des conventions sur le travail forcé101 (par exemple dans le cadre des menus travaux de village102). De même, lorsqu’une peine comportant du travail obligatoire frappe plus lourdement certains groupes définis en onction de considérations raciales, sociales, nationales ou religieuses, cela relève de la convention103 (même si le délit réprimé

par la peine est un délit de droit commun qui ne bénéficie pas autrement de la protection (de l’article 1 a), c) ou d)) de la convention).

Notes

1 Art. 1, paragr. 1, de la convention.

2 Pour la définition du travail forcé ou obligatoire donnée dans la convention ainsi que les exceptions à cette obligation, voir les sections intitulées «Définition du travail forcé ou obligatoire» et «Exclusions du champ d’application de la convention» (subdivisions 4.2.2 et4.2.3, ci-dessous).

3 Art. 25 de la convention.

4 Art. 2, paragr. 1, de la convention.

5 Art. 2, paragr. 2, de la convention; voir subdivision 4.2.3 ci-après.

6 Dans le texte de la convention, le critère de ne pas s’être «offert de plein gré» est distinct de «la menace d’une peine quelconque». Pourtant, lorsque le consentement à un travail ou service a été donné déjà «sous la menace d’une peine quelconque», les deux critères se recoupent: il ne saurait y avoir libre consentement sous la menace. Mais la distinction entre

les deux critères prend tout son sens lorsqu’il y a différence dans le temps, comme dans le texte de la convention: une personne peut s’être portée volontaire pour une carrière dans les forces armées et, ce faisant, avoir accepté librement et en connaissance de cause un poste dont la désertion sera passible de peine.

7 Conférence internationale du Travail, 65e session, 1979, rapport III (partie 4B), étude d’ensemble des rapports concernant la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, et la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957 (ci-après: étude d’ensemble de 1979 de la commission d’experts sur l’abolition du travail forcé), paragr. 20.

8 Déclaration universelle des droits de l’homme, art. 26; Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, art. 13-14.

9 Des dispositions concernant la fixation d’un âge de fin de scolarité figurent entre autres dans la convention (nº 117) sur la politique sociale (objectifs et normes de base), 1962, art. 15, paragr. 2.

10 Notamment la recommandation (nº 136) sur les programmes spéciaux pour la jeunesse, 1970, indique (paragr. 7 (1) et (2) a)) que des programmes d’instruction et de formation obligatoires pour jeunes chômeurs sont compatibles avec les conventions sur le travail forcé mais exige le consentement préalable à tout programme comportant une obligation de service (paragr. 7 (1) et (2) b)).

11 BIT: étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 20, avec indication de sources antérieures.

12 Ibid.

13 Conférence internationale du Travail, 14e session, 1930: Compte rendu des travaux, troisième partie, p. 691. CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 21.

14 CEACR, demande directe 1999, convention nº 29, Royaume-Uni.

15 BIT: CEACR, rapport III (partie 1A), CIT, 89e session, 2001; rapport général, paragr. 129; ibid., rapport III (partie 4A), CIT, 82e session, 1995, observation, convention nº 29, France.

16 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 97-101.

17 Par exemple, rapport de la Commission d’enquête instituée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’Organisation internationale du Travail pour examiner l’observation par la République dominicaine et Haïti de certaines conventions internationales du travail concernant l’emploi de travailleurs haïtiens dans les plantations de canne à sucre de la République dominicaine (BIT, Bulletin officiel, supplément spécial, vol. LXVI, 1983, série B). Rapport du Comité chargé d’examiner la réclamation présentée par la CLAT en vertu de l’article 24 de la Constitution, alléguant l’inexécution des conventions (nº 29) sur le travail forcé, 1930, et (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, par le Brésil.

18 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 45.

19 Voir ci-dessous subdivisions 4.2.3 a) et 4.2.3 c).

20 Ibid.

21 Voir également la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et le Protocole additionnel à cette convention visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (document des Nations Unies A/55/383 et Add.1); l’article 3, alinéa b), du Protocole spécifie que «le consentement d’une victime de la traite des personnes à l’exploitation envisagée, telle qu’énoncée à l’alinéa a) du présent article, est indifférent lorsque l’un quelconque des moyens [de contrainte, fraude, tromperie, abus d’autorité, etc.] énoncés à l’alinéa a) a été utilisé». 22 Voir plus haut subdivision 4.2.1.

23 BIT: rapport de la commission d’experts…, rapport III (partie 4A), CIT, 70e session, 1984, observation, convention nº 29, République fédérale d’Allemagne.

24 BIT, Conseil d’administration, nov. 1997, document GB.270/15/3, paragr. 30.

25 BIT: rapport de la commission d’experts…, rapport III (partie 4A), CIT, 83e session, 1996, observation, convention nº 29, Pakistan, paragr. 5; rapport de la Commission d’enquête instituée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT pour examiner le respect par le Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930 (BIT, Bulletin officiel, supplément spécial, vol. LXXXI, 1988, série B), paragr. 206.

26 Par exemple, convention (nº 138) sur l’âge minimum, 1973, art. 3, paragr. 1, et convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, art. 1, 2 et 3 d).

27 De même, aux termes de l’article 3, alinéa c), du Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, déjà cité plus haut dans la note de bas de page 21, «le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil d’un enfant aux fins d’exploitation sont considérés comme une ‘traite des personnes’ même s’ils ne font appel à aucun des moyens [de contrainte, etc.] énoncés à l’alinéa a) du présent article»; l’alinéa d) spécifie que «le terme ‘enfant’ désigne toute personne âgée de moins de 18 ans».

28 Par exemple, BIT: rapport de la commission d’experts…, rapport III (partie 1A), CIT, 2001, observations, convention nº 29, Haïti, Inde, Indonésie, Sri Lanka, Thaïlande.

29 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 71, et BIT: rapport de la commission d’experts…, rapport III (partie 4A), CIT, 68e session, 1982, observation, convention nº 29, Belgique.

30 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 68. La CEACR relève encore à titre d’illustration de ce même principe que la convention supplémentaire de 1956 relative à l’abolition de l’esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage vise à son article 1 a), entre autres, l’état ou la condition résultant du fait qu’une personne s’est engagée (en garantie d’une dette) à fournir ses services personnels si la durée de ces services n’est pas limitée (ni leur caractère défini).

31 (En temps de paix). Toutefois, les engagements éventuels de servir un certain nombre d’années en échange d’une formation supérieure reçue, par exemple en tant que médecin ou pilote, demandent une approche différenciée, qui tient compte d’éléments tels que la proportionnalité des obligations, la possibilité de rembourser le coût des études, les sanctions applicables, etc.; voir BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur le travail forcé, paragr. 72 et 60.

32 Par exemple, BIT: rapport de la commission d’experts…, rapport III (partie 1A), CIT, 88e session, 2000, observation, convention nº 29, Pakistan; ibid., rapport III (partie 1A)  CIT, 87e session, 1999, observation, convention nº 29, Bangladesh. 33 BIT: rapport de la commission d’experts…, CIT, 89e session, 2001, observation, convention nº 29, Iraq. 

34 Législation abrogée en 1998; BIT: rapport de la commission d’experts…, CIT, 87e session, 1999, observation, convention nº 29, Pays-Bas.

35 Art. 2, paragr. 2 a).

36 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 24, avec références aux travaux préparatoires  e la convention nº 29.

37 Voir subdivisions 4.3.1 et 4.3.3 b) ci-dessous. La CIT a réaffirmé ce principe lors de la discussion du projet de la recommandation (nº 136) sur les programmes spéciaux pour la jeunesse, 1970, jugeant incompatible avec les conventions sur le travail forcé une proposition qui aurait permis de contraindre des jeunes gens à participer à des programmes spéciaux d’emploi tendant au développement national, lorsque ces programmes sont organisés dans le cadre du service militaire obligatoire ou en lieu et place de celui-ci. Voir CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 25, avec références aux travaux préparatoires de la recommandation nº 136.

38 BIT: ibid., paragr. 26-32.

39 Art. 2, paragr. 2 d), de la convention. Voir d) ci-dessous.

40 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 31.

41 Art. 2, paragr. 2 b), de la convention.

42 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 34.

43 Voir a) ci-dessus.

44 Art. 2, paragr. 2 d); voir d) ci-dessous.

45 Art. 2, paragr. 2 e); voir e) ci-dessous.

46 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 34.

47 Art. 2, paragr. 2 c), de la convention.

48 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 90.

49 Ibid., paragr. 94.

50 En adoptant cette disposition, la Conférence a expressément rejeté un amendement qui aurait permis de concéder de la main-d’oeuvre pénitentiaire à des entreprises privées chargées de l’exécution de travaux publics (BIT: Compte rendu des travaux, CIT, 14e session, Genève, 1930).

51 BIT: rapport de la commission d’experts…, rapport III (partie 1A), CIT, 89e session, 2001; rapport général, paragr. 86 et 119.

52 BIT: rapport de la commission d’experts…, rapport III (partie 1A), CIT, 86e session, 1998; rapport général, paragr. 124.

53 Les parties essentielles du Mémoire ont été publiées sous le titre «Le travail pénitentiaire » dans la Revue internationale du Travail, vol. XXV, nºs 3 et 4 (mars et avril 1932), pp. 325-348 et 526-553.

54 BIT: rapport de la commission d’experts…, 2001, op. cit., rapport général, paragr. 96 et 122. La CEACR note encore aux paragraphes 97 et 98 que, dans son Mémoire de 1931, le Bureau indique que «si malgré tous ses défauts, le système de l’affermage n’a pas encore complètement disparu, c’est d’abord parce qu’il apporte à l’Etat d’importants avantages financiers », et que le système de l’entreprise générale «n’offre plus guère qu’un intérêt historique. Par contre, l’entreprise spéciale est un système encore très employé.»

55 Ibid., paragr. 123.

56 Ibid., paragr. 124-127. La commission d’experts note, entre autres, dans les travaux préparatoires, que l’amendement par lequel les mots «ou mis à la disposition de» ont été introduits à l’alinéa c), sur proposition du groupe des travailleurs visant à renforcer cet alinéa, aégalement ajouté les mots «compagnies ou des personnes morales» («companies or other entities » dans la version anglaise). Le mot «privées» a ultérieurement été inséré à la suite de «personnes morales» (en anglais, les mots «other entities» ont été remplacés par «associations») et le terme «personnes morales privées» couvrirait également les associations à but non lucratif.

57 Voir la subdivision 4.2.3 c) iii) ci-dessus, consacrée aux «Conditions pour un emploi privé de prisonniers». 

58 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 97.

59 Voir plus haut subdivisions 4.2.2 b) et 4.2.2 c) et BIT: rapport de la commission d’experts…, 2001, op. cit., rapport général, paragr. 128 et suiv. 60 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 97 et suiv.; voir ci-dessus subdivision 4.2.2 c) i) «Forme et objet du consentement».

61 BIT: rapport de la commission d’experts…, 2001, op. cit., rapport général, paragr. 129- 130, et ci-dessus les sections consacrées à la «Menace d’une peine quelconque» et l’«Offre de plein gré» (subdivisions 4.2.2 b) et 4.2.2 c)). 62 Ibid., paragr. 130.

63 Ibid., paragr. 143. Voir également, en ce qui concerne les conditions d’emploi, BIT: rapport de la commission d’experts…, rapport III (partie 1A), CIT, 90e session, 2002, convention nº 29, observation générale, paragr. 10-11, et observations sur l’Australie, l’Autriche et le Royaume-Uni.

64 Art. 2, paragr. 2 d), de la convention.

65 Voir ci-dessus subdivision 4.2.3 b).

66 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 36, et rapport de la commission d’experts…, 1997, observation, convention nº 29, Japon.

67 Art. 2, paragr. 2 e), de la convention.

68 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 37, et rapport de la Commission d’enquête instituée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’Organisation internationale du Travail pour examiner le respect par le Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930 (BIT, Bulletin officiel, supplément spécial, vol. LXXXI,

1998, série B), paragr. 213

69 Etant donné que même les travaux publics d’intérêt général relevant de la définition du travail forcé mais tolérés pendant une période transitoire (voir ci-dessous subdivision 4.2.4) étaient non seulement strictement réglementés, mais encore limités à un maximum de soixante jours par an (art. 12 de la convention), le caractère mineur des «menus travaux» totalement exemptés de la définition même du travail forcé se reflétera dans une durée d’un ordre de grandeur incomparablement plus petit.

70 Autres que celles spécifiquement exclues du champ d’application de la convention (voir ci-dessus la subdivision 4.2.3).

71 Art. 1, paragr. 1, de la convention.

72 Art. 1, paragr. 2, de la convention.

73 Rapport de la Commission d’enquête instituée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’Organisation internationale du Travail pour examiner le respect par le Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930 (BIT, Bulletin officiel, supplément spécial, vol. LXXXI, 1998, série B), paragr. 218; BIT: rapport de la commission d’experts…, 1998, op. cit., observation, convention nº 29, Bangladesh; BIT: rapport de la commission d’experts…, 2000, op. cit., observation, convention nº 29, Myanmar.

74 Ibid.

75 Voir plus bas la subdivision 4.3.3.

76 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 9 et 104.

77 Ibid., paragr. 39.

78 Convention nº 29, art. 2, paragr. 1; voir plus haut la subdivision 4.2.2.

79 Voir plus haut les subdivisions 4.2.1 et 4.2.3.

80 Voir la subdivision 4.3.1 ci-dessus.

81 Voir la subdivision 4.2.3 c) ci-dessus.

82 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 104.

La CEACR rappelle à ce sujet que la convention a été adoptée à la suite de l’enquête du Comité spécial du travail forcé ONU-BIT qui, se référant au travail forcé appliqué à titre de coercition politique ou de sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques, avait cité notamment des cas de travail imposé en vertu d’une législation pénale et à la suite d’une condamnation judiciaire. Aussi, le Conseil d’administration du BIT, en décidant d’inscrire la question du travail forcé à l’ordre du jour de la Conférence, a estimé que tout nouvel instrument adopté par la Conférence devrait traiter des pratiques qui sont expressément exclues du champ d’application de la convention de 1930 (ibid., note de bas de page, avec références aux travaux préparatoires).

83 La portée de la convention en ce qui concerne certaines restrictions inhérentes notamment à la liberté d’opinion et au droit de grève sera examinée dans les subdivisions 4.3.3 a) et d) ci-dessous.

84 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 105-106.

85 Ibid., paragr. 108. Il avait déjà été relevé lors des travaux préparatoires de la convention que, dans la plupart des pays, on considère comme normal que les personnes condamnées pour certaines catégories de délits soient obligées de travailler pendant qu’elles purgent leur peine, qu’un tel travail a un but pédagogique et est utile pour le moral des prisonniers et qu’il peut sembler raisonnable d’autoriser ce type de travail forcé, et inopportun de chercher à l’interdire d’une manière quelconque. Cependant, il avait été indiqué dans le rapport préparatoire soumis à la Conférence que cette même forme de travail forcé pouvait conduire à des abus, notamment du fait qu’elle risquait d’être imposée à des personnes condamnées pour

avoir certaines convictions politiques ou autres. L’instrument proposé devait prévenir ce danger (BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 107, avec références aux travaux préparatoires).

86 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 133.

87 Déclaration universelle des droits de l’homme, art. 29; voir aussi art. 5, 21 et 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

88 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 133.

89 Art. 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 1966.

90 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 134.

Les critères définissant une situation d’exception et l’exigence de la proportionnalité des mesures prises correspondent à ce qui a été dit, sous 4.2.3 d) au titre de l’article 2, paragr. 2 d), de la convention nº 29, sur le travail ou service exigé dans les cas de force majeure. Voir aussi plus loin la subdivision consacrée à la «Participation à des grèves» pour les interdictions exceptionnelles de la grève.

91 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 40.

92 La Conférence avait refusé de limiter l’interdiction prévue à l’article 1 b) au recours au travail forcé en tant que méthode «normale» de mobilisation et d’utilisation de la maind’œuvre à des fins de développement économique. BIT: Compte rendu des travaux, Conférence internationale du Travail, 39e session, Genève, 1956, p. 747, paragr. 11; ibid., 40e session,

Genève, 1957, op. cit., p. 736, paragr. 11.

93 Services dont l’interruption peut mettre en danger, pour l’ensemble ou une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne – critère correspondant à celui des situations d’exception visées plus haut sous a) (voir note 90).

94 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 110.

95 Voir, entre autres, ibid., paragr. 111-119, et CEACR, divers commentaires plus récents sur l’application de la convention dans un certain nombre de pays.

96 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 120. 97 Voir Conférence internationale du Travail, 40e session, Genève, 1957: Compte rendu des travaux (Genève, BIT, 1958), p. 736, paragr. 14.

98 Idem, 39e session, Genève, 1956: Compte rendu des travaux (Genève, BIT, 1957), p. 745, paragr. 12.

99 Voir chapitre 2.

100 Voir également BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 122-132.

101 Ibid., paragr. 42.

102 Voir ci-dessus les subdivisions 4.2.3 e) et 4.3.3 b) pour ce qui est de l’importance quantitative de ce qui relève de l’article 1 b) de la convention nº 105.

103 BIT: CEACR, étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, paragr. 141.

 

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